ALGÉRIE • Quand Sarkozy ruine les espoirs gaziers russes
Au grand dam de Moscou, les vastes projets de coopération russo-algérienne engagés en 2006 n’aboutissent pas. Pour le journal russe Kommersant, les causes du revirement d’Alger sont à chercher du côté du président français Nicolas Sarkozy
Les entreprises russes rencontrent de plus en plus de difficultés en Algérie, considérée jusqu’ici comme le partenaire privilégié de Moscou en Afrique. Récemment, le journal américain The Wall Street Journal, citant Mohamed Meziane, PDG de la Sonatrach [société énergétique nationale algérienne], a annoncé que « le pacte de coopération entre les compagnies pétrolières nationales algériennes et russes, signé en août 2006, est caduc depuis quelques mois ». L’accord en question posait les bases juridiques de projets d’extraction d’hydrocarbures et de production de gaz liquéfié. Par ailleurs, la Russie et l’Algérie avaient déjà tenté de consolider leurs positions sur la scène énergétique mondiale. Ainsi, le pouvoir algérien avait soutenu, l’année dernière, la proposition russe de créer une « organisation des pays exportateurs de gaz » sur le modèle de l’OPEP.
La déclaration surprenante du patron de la Sonatrach intervient peu après la visite officielle en Algérie de Nicolas Sarkozy [du 3 au 5 décembre 2007]. Ce dernier a annoncé la signature de contrats en Algérie pour 5 milliards d’euros, avant tout sur le gaz naturel. Ainsi, Gaz de France a conclu un accord pour la fourniture de gaz naturel liquéfié par la Sonatrach jusqu’en 2019. L’Algérie est le troisième fournisseur de gaz naturel en Europe, après la Russie et la Norvège.
Des divergences entre la Russie et l’Algérie existent également dans le domaine de la coopération militaro-technique. Rappelons qu’en mars 2006, durant la visite officielle du président russe Vladimir Poutine en Algérie, plusieurs accords avaient été signés pour une valeur de 8 milliards de dollars [5,45 milliards d'euros]. En contrepartie, la Russie avait entièrement annulé la dette extérieure algérienne de 4,7 milliards de dollars [3,2 milliards d'euros], héritée de la période soviétique.
Mais, par la suite, l’Algérie a cessé d’honorer certains de ses engagements. Ainsi, après une première livraison d’avions de chasse, fin 2006, l’Algérie n’a plus acheté d’autres appareils, prétextant la mauvaise qualité de deux des MIG qui lui avaient été fournis. Au mois de novembre, la question des exportations vers l’Algérie a été examinée au sein de la commission de coopération militaro-technique, présidée par Poutine. « Nous avons rédigé une réponse officielle, mais n’avons pas réussi à la transmettre au président algérien, même par le biais de son ambassadeur, déclare le représentant du Service fédéral de coopération militaro-technique. La partie algérienne ne donne aucune suite. »
Ces problèmes successifs résultent manifestement de luttes intestines entre dirigeants algériens. Ainsi, d’après Rouslan Poukhov, directeur du Centre d’analyse des stratégies et des technologies, « il existe une opposition entre élites militaires et énergétiques. Dans les deux camps, il y a des groupes d’intérêts prorusses, profrançais et proaméricains », dit M. Poukhov. « Ces six clans s’affrontent et prennent le dessus à tour de rôle. »
Natalia Grib, Konstantin Lantratov, Mikhaïl Zygar Kommersant Dail
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