Algeria-Watch, 16 janvier 2008
L’Organisation des Nations Unies par la voix de son Secrétaire général Ban Ki Moon a annoncé le 14 janvier 2008 vouloir «nommer un groupe indépendant chargé d’établir tous les faits concernant l’attentat d’Alger» du 11 décembre 2007 qui a touché les locaux des Nations Unies provoquant la mort de dix-sept membres de son personnel.Cette décision fait suite à la remise le 11 janvier par le Secrétaire général adjoint à la sûreté et à la sécurité d’un rapport préliminaire sur les circonstances de l’attaque. La mission de cette commission se réduira-t-elle à l’élaboration d’une stratégie visant à renforcer la sécurité des locaux et du personnel onusiens, comme le laisse entendre la presse algérienne ?
Pour le moment nous ne connaissons ni la composition, ni le mandat de « ce groupe indépendant » mais il faut espérer qu’il sera habilité à mener une enquête sérieuse permettant de déterminer non seulement les défaillances évidentes du système sécuritaire mais aussi les véritables responsabilités dans cet attentat.Nous saluons cette décision de l’institution onusienne tout en constatant qu’il a fallu que ses membres soient touchés pour qu’elle envisage une telle action. Les sanglants attentats et les crimes de masse des années 90 visant les populations civiles algériennes, bien qu’entourés de zones d’ombre et entachés de suspicion sur les auteurs et commanditaires, n’ont jamais bénéficié d’une telle démarche. Nous rappelons que lors de l’examen en octobre 2007 par le Comité des droits de l’ONU du dernier rapport périodique algérien, l’un des experts a clairement défini les disparitions forcées, massacres, attentats et autres violations graves comme étant des « crimes contre l’humanité ».
La seule initiative qu’a prise le précédent Secrétaire général de l’ONU fut de dépêcher en juillet 1998 une délégation pour une mission d’information. Celle-ci était constituée de personnalités choisies en accord avec les autorités algériennes. Son mandat était très restreint, se limitant à des visites organisées par Alger. Et en conséquence cette visite a abouti à des conclusions qui ne rehaussent guère le crédit de l’Organisation. Faut-il rappeler que le ministre des affaires étrangères algérien de l’époque se félicita des observations de la mission dans les termes suivants : « Le rapport est conforme à ce qui a été conclu entre nous et l’ONU ».
Nous espérons que cette fois-ci l’ONU saura respecter son engagement « d’établir tous les faits concernant l’attentat d’Alger » en toute indépendance quelles que soient les manœuvres du régime algérien. Dès l’annonce, certains officiels ont déclaré que cette décision est « interne » à l’organisation et que « le groupe d’experts indépendants de l’ONU qui doit être constitué ne porte pas atteinte à la crédibilité des enquêtes des services de sécurité »* . Le chef du gouvernement quant à lui exprime déjà sa désapprobation déclarant que cette mesure «ne peut être accueillie favorablement car l’Algérie fait son devoir au sujet de cette question»**. Le Secrétaire général aurait-il pris une telle décision si les conclusions de l’enquête algérienne l’avaient satisfait ?
Nous prenons donc acte de cette décision du Secrétaire général et observerons les efforts déployés par le groupe mandaté. Nous souhaitons que les conclusions soient rendues publiques.
* El Watan, 16 janvier 2008.
** Le Quotidien d’Oran, 16 janvier 2008.