31 mai, 2008
MAL DE FOI
Les propos de Souheib Bencheikh, mufti de Marseille, inspirés du procès de Habiba K. (El Watan du 29 mai 08) méritent d’être relevés et analysés dans leur contenu, indépendamment du contexte médiatique. Je m’y essaie, en précisant cependant que je ne défends pas un point de vue. J’aborde le sujet du point de vue de la logique du langage.
« Cette affaire est devenue internationale. On a l’impression que le mot christianisme est devenu une accusation. » C’est de bonne guerre : les mots islam, Algérie, juif, palestine… résonnent comme des accusations depuis fort longtemps. Pourquoi christianisme échapperait-il à ce … privilégié ?
« Les législateurs et les moralistes ne peuvent pas pénétrer la conscience des individus. Pratiquer le culte de son choix dans sa sphère privée (sa maison, son jardin…) échappe totalement à l’administration, … ». Monsieur Bencheikh court pour qui ? Acheter les conversions pour le prix modique de 5000€, si ce fait est établi, cela relève-t-il du libre choix du culte, de la sphère privée, du respect de la conscience des personnes ? Si oui, M Bencheikh considère-t-il que le port du foulard en France relève de la même sphère privée et a-t-il manifesté son désaccord avec l’intrusion de l’état français dans la réglementation relative à ce fichu ? Ou bien a-t-soutenu l’état français dans l’exercice de sa souveraineté ? Dans les deux cas, quelle place occupe-t-il au juste dans le débat public ?
Affirmant d’un côté : « Le Coran, qui est notre fierté, accorde la liberté religieuse la plus absolue (plusieurs versets coraniques parlent de cela). » (relisez bien avant de poursuivre), à la question intelligente du journaliste : « … est-ce qu’il ne faut pas faire adapter les textes législatifs à l’évolution mondiale en appliquant les principes de l’Islam que vous venez d’évoquer ? » il affirme avec la même assurance : « C’est une régression ! La Constitution garantit les libertés des cultes, l’Algérie est signataire des Déclarations universelles des droits de l’homme qui consacrent explicitement la liberté d’opinion philosophique, politique et religieuse. Donc, c’est une contradiction avec nous-mêmes, doublée d’une démarche stérile qui fait fuir l’autre. » !!
Où ce Monsieur situe-t-il la régression entre : « Le Coran, …, accorde la liberté religieuse la plus absolue… » et : » La Constitution garantit les libertés des cultes, l’Algérie est signataire des Déclarations universelles des droits de l’homme … ». Voilà comment on noie tranquillement le poisson dans son eau originelle. Cela s’appelle une pirouette mystico-politique, et ça n’augure rien sur le plan de la critique constructive. Pour qui court ce monsieur ?
En outre, est-ce la conversion en elle-même qui est jugée ou bien les circonstances dans lesquelles la conversion se réalise : dans la violation des lois du pays souverain qu’est l’Algérie ? Des lois qui, si j’ai bien compris et quoi que l’on en pense, interdisent la pratique de toute forme de culte sans autorisation préalable et sans déclaration de la personne qui anime le culte. Si c’est bien de cela qu’il s’agit, interrogeons-nous sur le sens du glissement des propos de M Bencheikh, qui déclare dans le même article : « Le peu d’arguments que nous avons pour montrer qu’il y a une possibilité pour la résurrection de l’Islam et que tout n’est pas perdu, il ne faut pas le toucher. ». Doit-on lire »il ne faut pas toucher à la résurrection du christianisme en Algérie », ou bien il nous faut entendre que l’islam est moribond mais que le déploiement du christianisme en Algérie ne constitue pas un danger … La question du sens de cette phrase se pose et ce serait bien que les personnes concernées par la publication de cette interview s’en assure.
Si c’est bien les circonstances qui posent problème et non la conversion en elle-même, il est urgent que cela soit affirmé sans ambiguïté. Cela apaisera sans doute les émotions des grands internationaux dont les motivations restent à définir si l’on s’en tient à la miise à feu spontanée des poudres, même quand la poudre est seulement virtuelle, dès lors que l’Algérie est au bout du fil.
Wi Yilène, à nulle pensée organisée sujet
NB: Le contenu de l’article n’exprime pas l’opinion du modérateur