La parole, un lien sûr pour la société humaine
Comme c’était la deuxième fois qu’une participation de moi ne passait pas, je me suis dit que tu (elmouhtarem) cherchais à me décourager. En général, je n’insiste pas; là où je ne suis pas la bienvenue, je me casse (je sais de quoi je parle d’ici !). J’apprends donc qu’il y a eu un oubli et je m’en réjouis car je reprends… espoir dans la possibilité d’instaurer la parole comme moyen de communication franc et sans concession.
La raisons pour laquelle je participe à ton blog est que je crois à la possibilité de sensibiliser à l’usage d’une parole libératrice. « Dire » ce que l’on ressent sans s’en prendre à l’autre, cela évite d’accumuler les ressentiments, les malentendus et les jugements définitifs, qui finissent par se concrétiser dans des « actes » de violence. Cela permet aussi de « réparer ». L’appel aux émeutes de notre copain Alban est un acte de violence lancé dans un moment de « rage » impuissante. Aussi impuissante que celle exprimée par le procureur qui requiert dix ans de prison pour la violation d’un drapeau (ma réflexion à ce sujet sera reproposée après relecture). Et si ce n’est pas le cas pour Alban, alors, c’est plus grave encore car il peut aussi être un acteur des troubles entretenus en Algérie. Voilà en quoi le camouflage identitaire pose un problème grave (voir ma contribution du 20 juillet « le camouflage identitaire, un non-lieu »).
Nous savons tous ce qu’une rage impuissante peut faire de nous, de chacun de nous: des êtres violents et destructeurs. Nous devons aussi garder en tête que la rage est l’aboutissement d’une souffrance réelle qui dure et s’aggrave avec le temps et les … intempéries. Le sentiment, l’état de « rage » en lui-même est naturel : quand on ne peut pas se sortir d’une impasse, ou bien on se laisse mourir, ou bien on fait « n’importe quoi » pour s’en soulager. Quand on n’a plus rien à perdre (surtout à « gagner » d’ailleurs), la violence est « naturelle » dans le sens où les animaux aussi en sont « frappés ». Les harragas, les prostitués, les drogués, les extrémistes de tous bords (dont les émeutiers) …, tous sont des personnes en souffrance à l’origine, et leurs actes de violence ne sont qu’une réaction de survie ; autant dire en situation de désespoir.
« Désespoir » : absence d’espoir. Pour en arriver là, il faut beaucoup de coups durs, beaucoup d’échecs, beaucoup de tentatives sans résultats, beaucoup de besoins non satisfaits. D’accord, mais l’appel à la violence ou la justification de la violence (elle insulte donc je peux insulter, et plus fort encore) est une violence supplémentaire faite à ceux qui en subissent déjà plus que leur dû. Il nous appartient dès lors, à nous qui en avons la possibilité, de le dire, de l’expliquer, de le répéter … jusqu’à ce que notre voix puisse se faire entendre et que l’on accepte, petit à petit, de marquer un arrêt dans son désespoir, de considérer que l’espoir est moins épuisant (et moins coûteux !), que, tant que nous avons la capacité de réfléchir, nous avons les moyens de modifier le cours des choses, et notre vie par la même occasion. Pour cela, il nous faut revoir nos certitudes et questionner les référents (politiques, éducatifs, économiques …) en tant que personnes responsables (et non « coupables », cela ferme un plus les portes), sur le sens de leurs politiques respectives. Il n’y a pas d’autre issue possible.
Si la violence de survie est une réaction saine et légitime parce que nécessaire, la violence institutionnalisée (politique, idéologique …), elle, est criminelle. Mais la violence de survie ne peut pas répondre au crime par le crime sans perdre sa légitimité et son « naturel ». Voilà pourquoi je persiste à affirmer que la violence en réaction à la violence reste une violence. Même la grève de la faim est une violence faite à soi-même car elle ne garantit pas l’issue.
Par Wi Yilan’
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