11 octobre, 2008
Deuxième anniversaire de l’assassinat de Rabah Aissat
A l’occasion du deuxième anniversaire de l’assassinat de Rabah Aissat, El Mouhtarem publie, pour la seconde fois, ce témognage de Zemouche R. présent sur le lieu de l’assassinat.
Pour ma part, le jour de l’assassinat du camarade Aissat, je me retrouvais à 4 kms de Ain Zaouia. D’ailleurs, j’avais tout de suite rejoint les camarades du FFS à l’hôpital de Draa El Mizane où se trouvait le corps de Da Rabah. Repose en PAIX. El Mouhtarem
Nous sommes le jeudi de l’avant dernière semaine du mois de ramadan 2006. A Ain Zaouia, la soirée est très mouvementée. Il est 20 h 45. Nous venons de terminer une partie de domino dans une cafétéria appartenant à ma famille. Je sors du café. Je me dirige vers mon cousin propriétaire d’une librairie situant en face. Avant d’arriver à la librairie, j’entends des manœuvres d’armes au niveau de la terrasse de la cafétéria. Tout d’un coup, j’entends des rafales, tout le monde s’est couché par terre. A cet instant, tous mes «logiciels mentaux » se déconnectent. Je suis resté bouche bée et accroupi jusqu’à ce que les nuages se dispersent. Je me mets à plat ventre ; j’essaye de voir ce qui vient de se passer. En vain. Je vois un individu qui court, une arme à la main, et tire des coups de feu en direction du siège de la garde communale, situé en face, pour empêcher toute intervention.
La scène dure pas plus de cinq minutes. Les tueurs s’évaporent dans l’univers. Le calme revient grâce au courage des jeunes qui risquent leur vie à tout moment.
Je prends mon courage à deux mains pour me rendre sur les lieux…A mon arrivée, je découvre un corps, criblé de balles (entre 8 et 9 balles), gisant dans un bain de sang. C’est Rabah Aissat, président de l’APW de Tizi-Ouzou. Je le prends dans mes bras et je crie à l’aide, car le corps est lourd. Aucun n’ose approcher ni se lever. J’essaye de mettre son bras sur mon épaule pour le prendre dans ma voiture, garée en face en milieu d’autres voitures. Incapable de faire sortir mon véhicule, je demande à un voisin, tout près de moi, de m’aider à le prendre dans sa voiture (Renault express). On démarre en direction de l’hôpital Krim Belkacem de la commune de Draa El Mizane
Nous arrivons à l’hôpital. Plusieurs personnes nous rejoignent. Ils sont venus dans des fourgons, des 404, des camionnettes…pour donner du sang….Le sort de Aissat est entre les mains des médecins de garde. Je constate l’arrivée d’un groupe de médecins dépêchés du CHU de Tizi-Ouzou. Malheureusement, entre 3h00 et 3h30, Rabah Aissat succombe à ses blessures. C’est une autre panique qui s’installe.
Vendredi matin, un seul sujet de discussion : le tragique évènement qui s’est produit la veille. Les gens parlent avec hésitation. On ne sait pas quoi dire encore moins quoi faire. Les gens se regardent et la méfiance s’installe. Ainsi, la ville de Ain Zaouia meurt et ne reprend la vie que plusieurs mois après la mort de Aissat.
Samedi matin, tout le monde attend l’arrivée de la dépouille du CHU Nadir Mohamed de Tizi-Ouzou. Toute la population de Ain Zaouia se rassemble. Le village natal de Aissat, Ain Laabid, devient inaccessible. Des gens de tout âge et de différents horizons arrivent. Je vois des députés, des artistes, des responsables, des cadres de la nation, des jeunes…Ils sont venus voir pour l’ultime fois le corps de Aissat et lui rendre un hommage. A Dieu nous appartenons et à Lui seul nous revenons. Il est le juge de toute âme. J’avoue que ce n’est pas facile de vivre de tels moments et de tels évènements qui dégradent notre société qui était saine autrefois. Mais laissant tout au Bon Dieu.
Par Zemouche R.