Mohamed Benchicou: «C’est un acte de censure médiéval»

benc.jpgLe journaliste et écrivain Mohamed Benchicou a dénoncé hier la censure dont a fait l’objet le manuscrit de son dernier livre Le journal d’un homme libre. «C’est un acte de censure inqualifiable et intolérable, il nous rappelle qu’on est proche d’un Etat bananier qu’un Etat de droit», a-t-il soutenu, visiblement outré et dépité, au cours d’une conférence de presse tenue dans les locaux du journal Le Soir d’Algérie.

Sofiane Aït Iflis-Alger (Le Soir)- Gravissime l’antécédent que Mohamed Benchicou est venu dénoncer ce dimanche: la censure d’un livre avant même qu’il ne soit imprimé, c’est-à- dire avant qu’il ne paraisse. Inqualifiable aussi la manière dont cette censure s’est exercée : une violente descente policière à l’imprimerie Mauguin, à Blida, et une perquisition qui a duré une demi-journée et qui s’est soldée par la saisie et du manuscrit et des documents en relation avec l’édition. «Les responsables de l’imprimerie ont été terrorisés», a rapporté Benchicou pour souligner la violence de cette descente policière. Une descente que nul motif légal ne justifie. «Le livre a souscrit à toutes les procédures réglementaires, du dépôt légal à la Bibliothèque nationale jusqu’au bon de commande en passant par le numéro ISBN. Il n’y avait donc aucune raison pour que le livre fasse ainsi l’objet d’une descente policière», a expliqué Benchicou, appuyant son affirmation par la mise à disposition de la presse d’une copie du dépôt légal effectué le 7 septembre 2008.

L’auteur, victime de la censure, a rapporté aussi que la directrice de l’imprimerie lui a avoué que les policiers qui ont accompli la perquisition et la saisie des documents lui ont déclaré qu’«ils agissaient selon un ordre venu de très très haut». Qui donc a ordonné cette censure ? Pour Benchicou, il ne fait aucun doute que l’ordre en question provient de ceux qui «veulent faire de moi un exemple à ne pas suivre. De ceux qui vivent mal le fait que la prison qu’ils m’ont infligée ne m’a pas réduit au silence». D’ailleurs, il s’est déclaré fermement convaincu que ce n’est pas le contenu du livre qui a motivé cette censure mais le nom de l’auteur. «Je ne crois pas que ce soit le contenu du livre qui a motivé une descente aussi violente. C’est un message qu’ils veulent délivrer aux intellectuels de ce pays. Ils veulent faire de moi l’exemple à ne pas suivre. C’est là une logique du pouvoir répressif.»

Benchicou a fait part des pressions qu’a dû également subir le directeur de la Bibliothèque nationale, Amine Zaoui. Des pressions qui l’ont amené à se déjuger et à annuler le dépôt légal. «Après la descente policière et après que les policiers furent surpris de découvrir que le livre disposait d’un dépôt légal, le directeur de la Bibliothèque nationale a envoyé un message à la directrice de l’imprimerie l’informant que le dépôt légal comportait une erreur et, donc, l’annulait. Selon des informations à vérifier, Amine Zaoui aurait été limogé pour cette affaire et pour une autre affaire qu’il cumulait», a affirmé Benchicou.

Comment l’auteur compte-t-il réagir face à cette censure ? Il n’a pas l’intention de saisir la justice. «Je ne vais pas saisir la justice, parce que je ne crois pas en cette justice», a-t-il tranché. Se résignerat- il ? Oh ! que non. «Je n’accepte pas, je ne me tairai pas sur cet acte de censure médiéval. Parce que, sinon ce serait avaliser l’idée que dans ce pays on ne peut pas publier librement. Je ne me contenterai pas de voir mon livre sortir uniquement en France.» Benchicou, qui a rappelé que c’est pour la seconde année consécutive qu’il fait l’objet de censure, a indiqué que «contrairement aux Geôles d’Alger, son dernier livre Le journal d’un homme libre est censuré avant qu’il ne paraisse ». Benchicou a estimé que «la censure dont son livre a fait l’objet est une affaire qui concerne un métier, c’est une grave atteinte à la liberté d’éditer et au droit de s’exprimer». Benchicou a regretté, enfin, que son emprisonnement n’ait malheureusement pas servi à l’avancée de la liberté d’expression. Il a informé qu’il a saisi le Syndicat national des éditeurs de livres et il a dit espérer une réaction de sa part et de la part des intellectuels, écrivains et journalistes pour que «ne soit pas hypothéqué le droit d’éditer».

Le dernier livre de Benchicou est, comme son titre l’indique, un journal qui démarre le 14 juin 2006, à sa sortie de prison, et qui s’achève le 14 juin 2008. «C’est une sorte de suite aux Geôles d’Alger. C’est un regard sur les événements vus avec des yeux autres que celui de journaliste.» Il est question dans ce livre de la guerre des clans que suscite le troisième mandat de Bouteflika. Le livre, à défaut d’impression ici en Algérie, sera mis sur le Net. Promesse de l’auteur. Sinon, il sort en France, fin octobre, aux éditions Riveneuve.
S. A. I.

Commentaires

  1. Sniper dit :

    Censurez la plume rebelle
    Murez l’esprit critique
    Muselez la langue incisive.
    Purifiez dans les écrans et les médias
    La parole et l’opinion.
    Par l’opium et le bâton.
    Chassez les hommes libres
    Tuez-les
    Étouffez-les
    Persécutez-les
    Utilisez tous les moyens qui vous conviennent
    Qu’a cela ne tienne
    Vous ne faîtes qu’anoblir leur idées
    Vous ne faîtes qu’avérer leur combat
    Vous ne faîtes que préparer leur auréole
    Leur douleur est un pinceau magique
    Qui peint sur les murs et les toiles
    Vos portraits piteux et sombres
    Vos âmes hideuses et sans scrupules
    Vous les bourreaux de l’ombre
    Vos bâillons et vos bandeaux
    Sont autant d’instruments
    Qui sculptent à merveille
    Par la mains des esprits libres
    Vos crimes et vos lâchetés cruelles
    Piètre fin
    Que réserve le destin
    Pour vous, qui vivez et mourez assassins.

    Modeste hommage au troubadour de la sagesse et de la justice
    À Ammisaïd qui appréciera…. j’espère

  2. Fouroulou dit :

    La vie ou la survie même des personnages comme Benchicou est un problème de santé publique.
    Cela ne veut pas dire qu’il faille lancer un appel au meurtre ! Mais seulement à ne montrer aucune compassion envers des personnages comme lui qui se veulent victimes d’un régime qu’ils ont sciemment cautionné, entretenu, soutenu et sollicité dans ses multiples dérives qui sont plus souvent aussi mafieuses que meurtrières.
    Un espace d’expression comme celui-ci qui relaye un Sofiane Aït Iflis quand il pose la censure d’un Benchicou comme un acte gravissime me pose un problème !
    Poser Benchicou comme victime d’un ordre injuste pose un problème de sens et de mémoire.
    Benchicou a aussi été lui-même et durant plusieurs années un petit Frankenstein d’un régime qui l’a rendu possible.
    Ceux de parmi le régime qui entretiennent encore une dent contre Benchicou cherche à l’humilier d’avantage pour ses mauvais choix. L’humiliation consiste à l’enfoncer dans le statut du perdant impuissant.
    Les personnes comme Benchicou ne sont pas porteurs d’une vérité intéressante ou d’une alternative de quelle nature que ce soit.
    Benchicou, comme beaucoup d’entre nous d’ailleurs, ont d’abord l’obligation d’un travail d’humilité et de lucidité.

  3. mark wanes dit :

    Les instituts (gama3ya) islamiques n’ont jamais produit de prix Nobel de physique ou de mathématiques capables de nous sortir du sous développement permanent et ce depuis des siècles au contraire ce sont des usines à terroristes par procuration .Le journal d’un homme libre est un Nobel de courage à lui tout seul. Pour sortir de notre misère culturelle il faut plus de religion, pour le salut de nos âmes et le repos dans un paradis eternel il faut égorger le savoir et la culture et nous maintenir dans une ignorance quasi structurante. Une écriture hors moule est de fait un danger immédiat pas pour nous peuple ou du moins c’est le sentiment de nos protecteurs car tout est fait pour nous protéger sauf d’eux……même

  4. justice&verité dit :

    Oú sont ces in-tel-lectuels decents-integres d’algerie?
    pauvre Benchicou!
    á qui le prochain tour?

    Benchicou, le pauvre …
    il fut un certain un temps le « stylo », l’avocat, le haut- parleur et le megaphone des eradicateurs …etc

    c’etait le temps oú des algerien(ne)s se font moucharder par une junte au pouvoir qui ne dit pas son nom.

    Tahar Djaout et autres vrais plummiers decents furent assassinés par le pouvoir, Benchicou et cie « plummutifs » avec l’aggrement du regime sanguinaire et assassin nous chantaient alors que c’est le GIA et point final mais ils n’ecrivent pas que ce GIA est le DRS et rien d’autre.

    Il etait bon/serviable/docile pour cette dictature sanguinaire sur terre.

    Dieu est grand!

    Le temps passe et les dictateurs changent d’habillements (de l’alpaga á Cerruti et vice-versa; Nahnah le terro chantait une fois, je suis un musulman moderne, je porte l’alpaga…), toujours le meme denominateur cad des sanguinaires/assassins qui changent uniquement les habits/stylos/cahiers et megaphones … leurs in-tel-lectuels ces miserables de service.

    Ceux qui furent user hier ne sont plus rentables aujourd’hui.

    Il y’a d’autres miserables pretendus in-tel-lectuels pour un petit INDECENT dollars/euro qui se positionnent et prennent place …

    Oú sont ces intellectuels INTEGRES d’algerie?

    Bon malgré son passé « mouchard » (pro-eradicateur), Benchicou merite quand meme notre soutien, non pas pour soutenir ses actes indecents du passé mais pour la LIBERTè d’expression.

    Nous avons le devoir de SAUVER la liberté d’expression qui est un danger pour tous les dictateurs sur terre.

    Au bon entendeur.

  5. pensée libre dit :

    la voix des hommes libres est tonutruante pour les pavillons des soumis sourtout quand il veullent plaire, encore, au prince du moment quite à renier son propre parcours associatif d’abord et politique ensuite afin d’appartenir aux castes des sangsues.

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