13 mai, 2009
Une histoire d’alcôve qui éclabousse la police et fait trembler la justice
Par Sniper
Le jugement de l’ex-patron des renseignements généraux d’Oran, pour une sombre affaire de détention de stupéfiant et de moeurs, sent le roussi qui s’échappe d’une boîte de Pandore à laquelle le juge a peur de toucher. Et pour cause. D’après le prévenu, la direction générale de la sûreté nationale, la gardienne de la paix civile et de l’ordre public, abriterait des ripoux qui s’adonnent à des activités criminelles. Il en aurait les dossiers compromettants avec preuves à l’appui, a-t-il martelé au juge. Il s’est montré disponible pour les révéler si le tribunal l’exige. Il assure que les recherches qu’il avait initiées lui valent maintenant ces accusations montées en toutes pièces par les enquêteurs de la DGSN. Ils veulent le mettre hors d’état de nuire en le déshonorant et en le décrédibilisant. Le professionnel des renseignements généraux aurait été soumis à un chantage odieux afin de le contraindre à faire disparaître les résultats de ses investigations. Ils avaient pourtant un moyen de pression si terrible qu’ils auraient fait plier n’importe quel haut responsable. Suivez bien !
Pour les trois cassettes vidéo et l’album de photos pornographiques saisis dans le bureau de l’inculpé, lors de la perquisition (eh oui ! Ils sont croustillantes ces histoires de flics; il faut que l’honneur soit touché sinon le film est fade), dans lesquelles ce dernier et sa concubine jouent les stars de la pornographie, l’avocat de la défense a déclaré que son client avait avoué sans ambages les avoir produits pour un usage strictement privé. Il assure qu’il n’y avait aucune intention ni aucune preuve de commercialisation ou de diffusion. Il n’a jamais exercé de violence ou d’intimidation contre sa campagne pour céder à ses caprices sexuels. Sa deuxième femme « halal », dont la famille reconnaît la légitimité de son union religieuse avec l’officier, appuie le témoignage de son époux chéri. Le chef des renseignements généraux d’Oran, imitait-il simplement les méthodes utilisées par un certain Andrew Warren ? À bien réfléchir sur ce scandale, le chef de la CIA a fait des émules ou des disciples et beaucoup de dégâts dans le milieu des services de renseignement en Algérie…
Avant de continuer, résumons cet imbroglio époustouflant qui franchit les limites de l’entendement ! Si l’on se fie à ce qui a été rapporté par El khabar en arabe, un grand responsable des RG d’Oran, dont le nom est tenu confidentiel et qui représente l’ordre et la sécurité utilise la religion musulmane, prend une deuxième épouse sans passer par la mairie, pour s’offrir avec elle des coucheries en cristallisant des moments torrides sur des photos ou des vidéos avec l’approbation de sa partenaire. Comme souvenir d’amour, il n’y a rien de tel; ils restent gravés à jamais… Pour détruire cette charge répréhensible aux yeux de la société, son avocat retire sa toge pour la circonstance et endosse une djellaba et se coiffe d’un turban comme un auguste mufti, et dit le plus normalement du monde: « la religion ne l’interdit pas ». Qui a dit que l’Islam était contre la luxure… Autrement dit, d’après ce mufti d’un jour, quand un comportement est religieusement licite, la loi et le juge doivent fermer les yeux. Pour nous, simples spectateurs interloqués, nous nous demandons pourquoi un tel principe a pu échapper aux persécuteurs de son client.
Poursuivons encore notre récapitulation. Les photos et les vidéos intimes, seraient tombées facilement dans les mains de la police des polices. Ces enquêteurs ont été mis dans le secret de ce couple par Ibliss en personne avec qui ils auraient un téléphone rouge pour résoudre les cas graves… C’est ce même diable qui, au quatrième jour de la perquisition, leur aurait soufflé l’endroit où se trouve « l’arme du crime »: 19,5 g de kif cachés dans une boîte de cigarette rangée dans un tiroir du bureau. Tout est bien qui finit bien… Deux chefs d’accusation, dont un est « licite religieusement », ont suffi pour nos professionnels puritains de la sécurité, pour traduire un des leurs devant la justice et lui régler son compte.
Ces deux charges sont si légères, si douteuses, qu’ils peuvent se retourner contre les plaignants et le parquet pour atteinte à la vie privée, complot, faux témoignage, chantage, abus de pouvoir, persécution, etc., en plus des charges qui viendraient peser sur eux à l’issue de l’enquête liée aux accusations de l’inculpé.
C’est à ce moment-là que notre inculpé et présumé victime, se souvient curieusement qu’il est en possession de dossiers criminels impliquant certains de ses confrères véreux. On se demande pourquoi ils auraient pris un si grand risque de ne pas céder à l’intimidation. Mais surtout qui l’a désigné dans ce poste important et depuis quand la Centrale était-elle au courant de son péché véniel ? Beaucoup de chose reste diffus dans cette affaire.
Plus étrange encore est l’attitude de madame le juge qui ordonne à l’inculpé de ne pas citer les noms des responsables de la police qui sont soupçonnés avec preuves disponibles, de faire plus de tort à la société qu’un vulgaire vice personnel. Comment qualifier aussi sa passivité et son absence de réactions devant le refus catégorique de la Direction générale de la Sûreté nationale de livrer au juge d’instruction le procès-verbal de l’interrogatoire auquel l’inculpé a été soumis. Ne voit-elle pas que les hommes de Ali Tounsi font une obstruction caractérisée à la justice?
Pourquoi n’use-t-elle pas de la force de la loi pour chasser une engeance dangereuse qui se tapirait dans des structures stratégiques de l’Etat algérien et protéger la société de leur fripouillerie.
Quelles sont cette morale biscornue et cette loi scélérate, qui l’en empêcheraient ?
A-t-elle peur de franchir des lignes rouges ? L’inculpé joue son va-tout et il risque d’aggraver son cas avec un autre procès pour faux témoignage et atteinte à un corps constitué, s’il s’avise de tromper la justice. Il ne peut pas risquer son avenir pour si peu de chose. Le dilemme est grand pour le juge. Tourmenté probablement par sa conscience, ce magistrat voit sa carrière chanceler entre la sincérité tardive d’un paillard et le puritanisme apprêté de ripoux. Elle serait la première perdante sur le plan moral si elle opte pour la voie la plus facile qui consiste à prendre le bâton par le milieu. Car la société subira encore les méfaits des présumés ripoux pour de longues années encore. Qui sait, peut-être que l’un des siens serait une de leurs prochaines victimes.
Le lendemain matin, toute la presse va s’emparer de l’affaire et rapporter les graves développements qui allaient certainement se produire, un peu partout, dans les médias, dans le monde politique et le milieu de la police, pensé-je naïvement. Des têtes vont tomber ! Bouteflika va frapper fort. Son bras séculier, Elhadj Zerhouni, n’allait certainement pas rester les bras croisés; il allait sévir contre les officiers qui pourrissent la Sûreté nationale et contre qui des preuves seraient détenues par le prévenu. Sans attendre la levée de boucliers qui se profilait, il allait sûrement diligenter une enquête interne et ferait un compte rendu à la presse et répondrait aux questions des journalistes et des députés indignés et très soucieux de la moralité des représentants des agents de la sécurité et de l’ordre public. Car monsieur Zerhouni sait bien que c’est l’image et la crédibilité de son ministère et ceux de la DGSN, sont sur la sellette une fois encore. Les mauvaises langues ne tarderaient pas à se délier contre lui et contre tout le corps de la police. Celle-ci est déjà illustrée dans des bavures policières un peu partout dans le pays. Lui qui est déjà soupçonné de fraude électorale, il allait se racheter ou, au moins, émousser les griefs qui le visent en montrant une impartialité implacable à l’encontre de ceux qui ternissent la réputation de la Police.
L’autre chef des poulets, le colonel Tounsi, qui n’en rate pas une pour nous pigeonner avec des déclarations pompeuses de type « l’Etat de droit commence par la Police », ou de type « Tout policier coupable de bavures doit payer », montre par son arrogance ostensible pour le juge d’instruction, tout le mal qu’il pense de la Justice algérienne et du peuple algérien.
Mais le lendemain, point de nouvelle sur le scandale. L’information n’a pas fait un malheur, semble-t-il. C’est à peine si Elmouhtarem lui a accordé un espace dans son Blog.
Ne voyant aucune nouvelle sur l’affaire des ripoux, je me suis précipité dans mon boui-boui habituel et, du coin de l’œil, j’ai scruté des visages ternes et soucieux, et j’ai tendu l’oreille vers des tables environnantes: peine perdue. Pris dans le tourbillon des difficultés quotidiennes, il y a longtemps que le petit peuple se fiche de l’intérêt général et les problèmes publics. Il sait que chaque jour qui passe, c’est un jour béni comme si l’horizon est toujours plus sombre. Il traîne sa misère et sa faiblesse comme un boulet fatal attaché à ses pieds, un mauvais sort que rien ne peut l’en délivrer.
A quoi sert donc ce feuilleton policier aux allures kafkaïennes? A pas grand-chose, sauf peut-être à montrer une fois de plus, à celui qui ne veut pas le croire encore, que l’Etat, le peuple, la société, la Justice et la vie en Algérie, se désagrègent et disparaissent à petit feu; à chaque scandale étouffé par le régime via un tribunal ou sans lui; dans l’indifférence de son élite et de ses intellectuels apprivoisés. Un pays ne saurait résister longtemps à un flot continu de telles injustices.
Cette affaire, sans suite, qui n’a soulevé aucune réaction, ressemble à un canular dont les journaux s’en repentent dès qu’ils le mettent sous presse. Un scandale sans histoire; sans remous. Tout ceci n’est qu’un fantasme politique d’un Algérien qui n’arrive pas à remplacer l’amour de sa patrie par celle d’un chien…
Au fait, où est maintenant Andrew Warren le concitoyen de Chakib…, je voudrais juste lui poser une petite question qui me taraude: était-il un maître ou un disciple en Algérie ?