L’épouse d’un opposant algérien n’aura pas de passeport suisse
Jugement | Selon le Tribunal administratif, l’octroi de la nationalité helvétique à la famille d’un homme condamné en Algérie pourraient affecter les relations entre les deux pays.
L’Office fédéral des migrations (ODM) a refusé avec raison de naturaliser l’épouse d’un ancien opposant algérien. Le Tribunal administratif fédéral (TAF) partage l’avis de l’ODM, qui estime que les relations de la Suisse avec l’Algérie pourraient en être affectées.
Ce couple algérien a immigré en Suisse en 1987 et vit aujourd’hui à Genève avec ses enfants. L’époux est physicien et il a travaillé au CERN. En 1994, le Ministère public de la Confédération a ordonné une enquête à son encontre parce qu’il était soupçonné d’être mêlé à une livraison d’armes au Front islamique du Salut (FIS).
Extradition refusée
L’affaire a été classée en 2000 par manque de preuves. Mais en 1996, sur des indications provenant de Suisse, la justice algérienne a émis un mandat d’arrêt international à son encontre et l’a condamné par contumace en 1997 à deux fois 20 ans de prison.
Les autorités suisses ont refusé son extradition. Après qu’il a été élu en 2002 par interim à la tête du bureau exécutif du FIS à l’étranger, le Conseil fédéral lui a cependant interdit, sous menace d’expulsion, de soutenir toute forme d’activité extrémiste ou de faire de la propagande.
En août 2002, son épouse a demandé la naturalisation pour elle-même et ses six enfants. Après le feu vert des autorités genevoises, l’ODM y a opposé un refus.
«Persona non grata»
A l’époque, l’ODM avait motivé son choix par le fait que les membres de la famille sont «persona non grata» dans leur pays d’origine. Une naturalisation serait perçue en Algérie comme un signe de bienveillance envers le mari, ce qui pourrait ternir les relations entre les deux pays.
De plus, une expulsion éventuelle du mari pourrait s’avérer plus compliquée si l’épouse et les enfants possèdent un passeport suisse. Le TAF a maintenant rejeté la plainte de la femme. Eu égard à deux enfants entretemps majeurs, le tribunal doit encore rendre deux verdicts séparés.
Selon le jugement, l’époux de la demandeuse a certes reconsidéré ses opinions politiques après avoir quitté le FIS en 2004. Mais il garde des contacts avec d’anciens militants islamistes et combat toujours le système politique en place en Algérie.
Cofondateur de «Rachad»
C’est ce qui ressort aussi de son engagement dans le mouvement «Rachad», qu’il a cofondé en 2007. Même s’il se réfère au caractère pacifiste de «Rachad», la charte du mouvement vise un changement «radical» en Algérie et refuse tout dialogue avec le pouvoir actuel.
Pour ces raisons, la conclusion de l’ODM quant à une éventuelle altération des relations algéro-suisses en cas de naturalisation de l’épouse est admissible. La plainte d’un chercheur algérien, débouté par l’ODM pour les mêmes raison, a également été rejetée par le TAF.
Lui aussi avait des contacts avec le FIS et en particulier avec l’époux de la demandeuse. Il est également membre et cofondateur de «Rachad». Les autorités algériennes le considèrent comme un terroriste et «persona non grata». (Jugement C-1121/2006 et C-1124/ 2006 du 21.8.2009) ATS
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