Le voile qui sépare le peuple de la vérité finira par se déchirer
El Erg Echergui
Ce sont des femmes d’un grand courage. Elles sont les seules à affronter la chape de plomb qui s’est abattue sur tout un pays depuis presque 20 ans. Elles sont les seules à troubler le sommeil du «général» de la mort, Medienne et son armée des seigneurs de la sale guerre, et le sommeil de Bouteflika et sa suite interminable de valets. Elles se rassemblent pacifiquement en défiant le pouvoir arbitraire et ses mensonges, en défiant les lois scélérates pondues par Bouteflika pour effacer de notre mémoire d’un trait de gomme tous les crimes et les carnages qui ont endeuillé notre terre.
Leur rassemblement et leur détermination sont la meilleure réponse aux insultes du président à qui elles font honte devant le monde avec leurs larmes et leurs cris de détresse. La brutalité policière utilisée contre «ces pleurnicheuses», dernièrement, explique bien cette honte puisque les raisons invoquées étaient « la présence de personnes étrangères » parmi leur mouvement pendant un précédent sit-in. Trois personnes étrangères ont fait trembler le régime algérien. Un motif, ô combien révélateur, qui, comble de l’ironie, est transmis par la bouche même de maître Ksentini, celui qui, à tout propos, prétend que l’Algérie est un pays modèle de la démocratie et que les droits de l’Homme y sont respectés. Mais la honte n’explique pas tout.
La volonté de cacher « ces pleurnicheuses » au regard du monde entier traduit la peur du régime de voir la communauté internationale s’indigner du traitement que l’Algérie a réservé aux très nombreux cas de violations des droits d’Homme et crimes contre l’humanité. Il a peur que le monde s’immisce dans les dossiers des disparues et des massacres perpétrés en Algérie. Trois personnes étrangères ont fait trembler le régime algérien. Résultat, les « pleurnicheuses » sont molestées sans état d’âme par la police d’un nouveau venu qui a donné l’ordre à ses policiers de traiter les Algériens avec dignité. Comme si la conscience d’un général algérien résiste à la tension.
Bouteflika n’est peut-être pas insensible à leur douleur. Il se trouve seulement dans une position très délicate qui le contraint à imposer par la force ou la subornation, le silence de celles qui n’ont que des larmes comme arme. Le seul pouvoir dont il dispose dans ces affaires de sécurité, est de réprimer la partie la plus faible. Il n’osera pas regarder ailleurs, c’est trop dangereux en plus qu’il serait ingrat envers ceux qui l’ont aidé de réaliser son rêve de président. Et puisqu’elles résistent à sa volonté et mettent en péril toutes ses campagnes de mensonges, il ne les supporte pas : elles lui rappellent trop sa honte de lui-même d’être incapable d’être juste et fort, d’être les trois quarts de président qui ne peut agir et gouverner ce pays que dans le sens voulu ou autorisé par ceux qui sont plus forts que lui. Elles lui rappellent trop son impuissance d’être un grand président dont l’histoire se souviendra longtemps. Elles lui rappellent son incapacité d’assumer son devoir de protéger la population contre les dérives d’une armée détournée de sa vocation républicaine en tombant sous le contrôle d’une bande d’assassins. Il le sait bien, car le moindre dossier d’un disparu ouvert et la boîte de Pandore s’ouvrira en dégageant une odeur infecte qui se répandra sur toute l’Algérie. Il l’a bien dit toute vérité n’est pas bonne à dire, même s’il s’agit de 10 000 disparus. Jusqu’à quand ce mépris de la vie humaine et cette impunité odieuse.
Ces mères qui ne fléchissent pas devant la puissance de l’Etat pour revendiquer un droit fondamental, celui de la vérité et la justice, pour eux et pour le peuple, sont don le symbole palpable et vivant d’un président semi-employé par les généraux. Par son refus de satisfaire leurs revendications légitimes, il montre qu’il n’est pas digne de la magistrature suprême. Il n’est pas capable de conduire un pays sans se soumettre aux lignes rouges tracées par l’armée ou sans fermer les yeux sur la manière dont les généraux ont conduit la guerre contre le terrorisme lors de la décennie rouge. Pour mieux camoufler sa honte, il appelle son silence et sa crainte « l’équilibre des pouvoirs » alors que le peuple y voit un équilibre de la terreur qui le prend en otage.
Devant la démission lâche des intellectuels, devant la trahison des hommes « historiques » et devant la soumission des forces « vives », ces femmes, dont la plupart sont vieilles, sont l’un des rares bastions qui revendiquent encore la vérité en Algérie. Que Dieu fasse qu’elles la connaissent avant qu’elles soient rappelées à Lui.
Hélas, dans notre pays , on s’efforce toujours de n’écouter que le silence!
Recherche désespérément une ex sénatrice, pour lui dire mon amertume devant son opportunisme coupable. Cette bonne femme, Meriem Belmihoub-Zerdani, ancienne moudjahida (maquisarde) et très engagée dans les droits de l’homme à la mode de chez nous, est venue en sa qualité de sénatrice à l’époque, accompagnée de sa smala à la télé à quelques jours de l’invasion américaine en Irak, pour nous dire sa colère sincère. Et d’enchérir en nous annonçons qu’elle était prête à aller combattre les forces du mal et par la même a appelé les larmes aux yeux, les masses populaires à se soulever contre l’hégémonie de la première puissance mondiale.
De l’eau est passée sous les ponts depuis et on vient tout juste de tabasser des vieilles femmes ici en Algérie et toujours pas de signe de vie de madame l’ex sénatrice. Certes, elle occupe toujours la scène nationale et internationale avec un poste au Comité des Nations unies pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Cedaw). Souscriptrice plus que jamais de l’avenir des femmes, prospérant à l’ombre de l’état providence, mais personne ne l’a jamais vue en tenue de combat à Baghdad ou ailleurs du reste, ni en tailleur haute couture dans les rues d’Alger aux côtés de ces mères, épouses, filles de disparus. Je parle d’elle, mais ils étaient des centaines de députés à nous tenir le même langage. Tous frappés de cécité ils observent religieusement depuis toujours un silence assourdissant et ceci afin de ne pas causer du tort à leurs petites carrières abondamment rétribuées. Nos grands commis de l’état et leur légendaire lâcheté c’est du concret… du factuel !!!!!